2 avril
Aujourd’hui, je rebondis sur la remarque qui m’a été faite hier, reproche ou compliment je ne sais, d’être un grand blagueur devant l’Eternel. Mais, si je
n’avais pas envoyé de poissons d’avril le 1er avril aurais-je dû le faire le 2, voire attendre des temps meilleurs. Et quel sens cela aurait d’envoyer un poisson d’avril le 15 août, je
vous le demande.
Du coup je vais essayer de me racheter en vous proposant quelques lectures sérieuses de circonstance qui devraient vous distraire plus que mes blagues stupides. Rien ne vous oblige à me suivre.
Pour vous mettre en appétit, un chapitre du Comte de Monte Cristo celui où Edmond Dantès, confiné au Château d’If découvre l’abbé Faria qui, lui, y est confiné depuis 15 ans.
Ensuite, vous prendrez peut-être un Robinson Crusoé qui vécut 28 ans confiné sur une île déserte, seul ou presque, vendredi ne comptant que pour sa moitié si l’on suit bien Michel
Tournier.
Il sera temps alors de passer à quelque chose de plus consistant avec les Carnets de la Maison morte de Dostoïevski, récit de quatre ans de bagne où il valait mieux n’être pas malade : «
Le médecin s’arrêtait ordinairement devant le lit de chaque malade. Il remarquait quelquefois que le prétendu malade ne l’était pas du tout. Il lui permettait parfois de rester une
semaine à l’hôpital ».
Pour finir, les dernières lignes du Journal d’Ivan Denissovitch, de Soljenitsyne, qui nous permettent de relativiser toute situation ; « Une journée a passé, sur quoi rien n’est venu
jeter une ombre, une journée presque heureuse. De ces journées, durant son temps, de bout en bout, il y en eut trois mille six cent cinquante-trois. Les trois en plus, à cause des années
bissextiles ».
Pour terminer vous prendrez le Journal de la guerre au cochon d’Alfredo Bioy Casarès, paru en 1918. Dans une ville imaginaire, les vieux sont poursuivis et éliminés par un virus social
qui s’est emparé de la jeunesse.
Et, si vous avez le temps, allez faire un tour à l’exposition Hopper, à côté de Bâle ; elle ne ferme que le 15 mai. « L’art de Hopper vaut conscience ou prescience du désastre. » (Mikaël
Faujour dans Marianne du 31 mars). Tout un programme en quelque sorte.
Et vivement le 1er avril 2021.
Si nous ne sommes pas tous déconfits d’ici là, évidemment.
Et devenus blagueurs pour l’Eternité.